La somnolence a été pendant longtemps un facteur d’accidentalité routière négligé, bien qu’il représente une part importante des causes d’accidents mortels sur autoroute. Comment lutter contre la somnolence au volant, à la fois par des mesures de sécurité routière, et à titre personnel ? L’association "40 millions d’automobilistes" fait le point.
En France, la somnolence au volant est la première cause de mortalité sur les autoroutes, responsable de près d’un quart des décès sur ce réseau [1].
Tous réseaux routiers confondus, il est difficile d’estimer exactement pour combien pèse ce facteur dans la mortalité routière : en effet, le facteur "somnolence / fatigue" est associé au facteur "malaise" dans les fichiers BAAC (la base de données des accidents corporels de la circulation renseignée par les forces de l’ordre). Ainsi, sur la période 2018-2020, 17% des conducteurs de véhicule de tourisme tués sur la route comportaient un facteur somnolence ou malaise [2].
Selon le Professeur Damien Léger, président du Conseil scientifique de l’INSV, les risques d’avoir un accident sont multipliés par 3 ou 4 dès les premiers signes de somnolence.
La somnolence au volant se manifeste tout d’abord par des bâillements et des paupières lourdes. Le besoin de changer de position, l’engourdissement des jambes ou encore les "absences" sont tout autant de signaux qui témoignent de la fatigue et donc du risque de somnolence du conducteur.
Pour commencer, il faut bien noter une chose : une fois la fatigue présente, on ne peut pas lutter contre ! Seul l’arrêt du trajet dans le but de se reposer peut permettre de recharger les batteries et éviter ainsi de s’endormir derrière le volant.
Les conseils pour se prémunir des risques de somnolence au volant sont les suivants :
• Éviter les "heures à risques" : elles se situent de 2h à 5h la nuit, et de 13h à 15h [1].
• Partir reposé en ayant dormi correctement avant un trajet. La Sécurité routière précise qu’il convient de ne pas constituer une dette de sommeil, mais encore de ne pas partir après une journée de travail.
• Effectuer des pauses toutes les 2 heures.
• Éviter, voire bannir la prise de certains médicaments : des pictogrammes présents sur l’emballage indiquent l’éventuelle incompatibilité de ceux-ci avec la conduite.
• Faire attention à son alimentation : une étude menée en juillet 2020 [3] a permis de définir qu’il existe des critères qui favorisent la vigilance au volant. Le repas idéal avant un long trajet devrait donc se constituer de l’index glycémique le plus bas possible, d’aliments qui ne demandent pas un gros effort digestif, mais encore de goûts qui "éveillent", tels que l’amertume et l’acidité.
• Plus surprenant, une étude scientifique publiée en juillet 2022 [4] a conclu qu’écouter ses musiques et podcasts préférés en voiture permettait de retarder l’apparition de la somnolence au volant.
Tout d’abord, on peut saluer les efforts des organismes de sécurité routière pour produire des campagnes de prévention liées aux risques de la somnolence au volant : qui ignore encore aujourd’hui le fameux chiffre clé indiquant la nécessité de prendre une pause toutes les 2h durant un long trajet ?
Ensuite, la présence régulière sur les autoroutes de bandes d’alerte audio-tactiles, qui prémunissent des sorties de route dues à la somnolence.
Enfin, toutes les voitures neuves homologuées en Europe à compter du 6 juillet 2022 doivent obligatoirement être équipées d’un avertisseur de perte d’attention et de somnolence du conducteur.
Une équipe de chercheurs du Centre du sommeil de l’Hôtel-Dieu - Université Paris Descartes a travaillé sur un moyen permettant de mesurer l’état de fatigue d’une personne par la salive. La recherche a effectivement permis de déterminer que la privation de sommeil se retrouve biologiquement dans la salive et a mesuré les biomarqueurs sensibles à la dette de sommeil. Un outil qui pourrait s’avérer prometteur dans le cadre de l’autoévaluation du niveau de somnolence.
Si lutter contre la somnolence au volant passe avant-tout par l’action personnelle, la route doit également pouvoir pardonner l’erreur humaine. Ainsi, "40 millions d’automobilistes" prône la généralisation des bandes d’alerte audio-tactiles sur le réseau routier, et appelle à développer, là où c’est possible, les infrastructures qui limitent les risques de sortie de route et les dangers liés aux potentiels écarts de trajectoire et qui éliminent le risque de choc frontal (ex : glissières de sécurité, séparateurs médians entre deux sens de circulation…).
En outre, il conviendrait de dissocier le facteur "somnolence/fatigue" du facteur "malaise" dans les analyses des causes des accidents routiers, afin de mieux mesurer et prévenir les risques liés à ce facteur d’accidentalité.
Sources :
[1] Documentation "Somnolence au volant" de la Prévention routière
[2] Bilan de l’accidentalité de l’année 2020, ONISR
[3] Étude Assurance Prévention, 2020
[4] Étude Assurance Prévention, 2022