ZTL : la menace silencieuse qui interdit les centres-villes aux automobilistes

Les Zones à Trafic Limité (ZTL), popularisées en Italie et maintenant mises en œuvre dans plusieurs villes françaises, se veulent des outils de régulation urbaine pour réduire la pollution et fluidifier la circulation. Mais derrière cet apparent objectif écologique, de plus en plus de voix s’élèvent contre un système qui s’impose sans réel débat démocratique en menaçant un peu plus la liberté de déplacement des citoyens, leur accès à la mobilité, tout en suscitant l’inquiétude des commerces de proximité. Les ZTL, indécentes successeurs des feues ZFE ? 

S'inscrire à la newsletter de 40 millions d'automobilistes

Qu’est-ce qu’une Zone à Trafic Limité (ZTL) ?

 

Une Zone à Trafic Limité (ZTL) est une zone urbaine dans laquelle la circulation automobile est fortement restreinte. Seuls certains véhicules y sont autorisés : transports en commun, riverains, services d’urgence, taxis, transporteurs de fonds, véhicules des services publics, véhicules de livraisons…

En cas de non-respect des règles d’accès à la ZTL, le contrevenant s’expose à une contravention de 4ème classe, soit une amende de 135€.

Les Zones à Trafic Limité sont signalées par le panneau illustré en tête d'article. Une signalisation horizontale peut aussi apparaître.

Les ZTL puisent leurs origines en Italie

 

C’est en Italie que les premières ZTL ont été expérimentées dans les années 1990. Ces zones sont aujourd’hui strictement contrôlées, et la moindre erreur d’inattention peut coûter cher, surtout aux touristes étrangers : souvent mal informés du dispositif, les contrevenants se voient infliger une amende à chaque entrée et sortie de ces zones, par le biais de caméras qui enregistrent les plaques d’immatriculation des véhicules qui franchissent le périmètre de la ZTL.

Les ZTL en France : une réalité en marche

 

En France, les ZTL ne sont pas encore généralisées, mais le mouvement est enclenché. Sous l’impulsion de la Loi Climat et Résilience (2021), de nombreuses métropoles mettent en œuvre ou projettent des ZTL dans leurs centres urbains.

La liste des ZTL en France :

• Nantes (depuis 2012)
• Grenoble (2018) 
• Rennes (2023)
• Strasbourg (pérennisée durant l’été 2023)
• Paris (en 2025)
• Presqu'île de Lyon (2025)

[Liste éditée le 08 juillet 2025]

Conditions d’application  : l’illisibilité au rendez-vous

Le dispositif s’appuie sur des arrêtés municipaux. Chaque ville définit :

• Le périmètre exact de la zone.
• Les horaires d'application.
• La liste des véhicules autorisés ou interdits.
• Les dérogations possibles.

 Actuellement, chaque ZTL déjà mise en place en France prévoit un champ d’application différent (liste non exhaustive) :

• À Nantes, la ZTL est constituée de deux secteurs régulés par des macarons définissant ses ayants-droits. Une autorisation peut également permettre d’y accéder.
• À Grenoble, la Zone à trafic limité se localise sur le boulevard Agutte Sembat et est également régulée par un"macaron ZTL". Le stationnement y est interdit à l'exception des véhicules des personnes à mobilité réduite.
• À Rennes, la ZTL est située dans le centre historique. La liste des dérogations est assez large : par exemple, les patients qui ont un rendez-vous médical dans la zone ou les clients des hôtels sont autorisés à y accéder avec une voiture, mais doivent se munir d’un justificatif.
• La Zone à Trafic Limité de Strasbourg s’étend sur le secteur rue des Juifs / rue des Frères, à partir de 11h jusqu’à 6h. Elle s’applique aussi bien aux véhicules en circulation qu’en stationnement.
• À Paris, la ZTL s’applique 24h/24 et 7j/7. C’est le fait de traverser la zone qui est interdit : le trafic de destination et le stationnement sont quant à eux autorisés, pour tous les motifs (consultation médicale, séance de cinéma, visite à des proches, livraisons, etc.)
• Sur la Presqu’île de Lyon, la Zone à Trafic Limité est régulée par des bornes escamotables accompagnées d’un système de lecture automatique des plaques d’immatriculation, afin d’identifier les usagers autorisés à entrer dans la ZTL. Chaque usager doit donc s’enregistrer au préalable. Si la zone est active 24h/24 tous les jours de la semaine, les bornes sont toutefois abaissées de 6h à 13h.

De quoi s’y perdre ! Le dispositif rend particulièrement complexe, voire illisible, l’application de la réglementation pour les usagers.

Quelles dérogations pour accéder aux ZTL ?

Les municipalités peuvent accorder des dérogations aux usagers suivants :
• Résidents du périmètre.
• Professionnels de santé, artisans, déménagements.
• Personnes à mobilité réduite.
• Livraisons, selon des créneaux horaires définis.
• Etc.

Encore une fois, ces dérogations varient d’une ville à une autre. Elles sont parfois très limitées, tandis que certaines communes élargissent les autorisations à de nombreux autres motifs, avec ou sans justificatifs à fournir.

ZTL : une mesure liberticide ?

La ZTL pose plusieurs problèmes fondamentaux :

1. Atteinte à la liberté de circuler

Au même titre que les ZFE, empêcher des citoyens de traverser la ville avec leur véhicule personnel est une restriction lourde de sens. Cela revient à conditionner l’usage de l’espace public à une autorisation, en dépit du droit élémentaire de se déplacer librement.

2. Menace pour l’économie locale

Les commerces de centre-ville souffrent déjà de la concurrence des zones commerciales en périphérie. En restreignant l’accès en voiture, les ZTL risquent de faire fuir une partie de la clientèle. C’est l’agonie du commerce de proximité qui s’accélère.

Selon les Commerçants de France (CDF), la ZTL parisienne menace près de 5000 commerces de centre-ville : la zone entraînerait une baisse de fréquentation des commerces de proximité, affectant les ventes et fragilisant les emplois locaux.

3. Impact négatif sur le tourisme

Des visiteurs, mal informés face à la complexité du dispositif, pourront se retrouver verbalisés simplement en essayant de visiter une ville. De quoi laisser un goût amer aux touristes…

Et la pollution, dans tout ça ?

Si les études montrent une baisse significative des émissions de dioxyde d’azote dans les centres-villes, l’impact de la mise en place des ZTL sur les émissions de particules fines est quant à lui souvent limité, et les résultats concernant la réduction du CO2 sont difficiles à quantifier.

Aussi, les études notent un effet rebond avec une augmentation des émissions en périphérie. Concernant la ZTL parisienne par exemple, l'analyse des études techniques pointe le manque d'intérêt du dispositif ; si la ZTL devrait effectivement améliorer la qualité de l’air en son centre, les reports de trafic provoqueront, eux, des concentrations bien plus fortes sur d’autres voies à cause des reports de circulation autour de la zone. Par ailleurs, notons que c’est le trafic de transit qui y est interdit dans la capitale : en invitant les usagers à contourner ces zones, ne rallongent-ils pas leur trajet, avec une hausse des émissions polluantes à la clé ?

L’avis de "40 millions d’automobilistes" 

En résumé, l’impact prévisible des Zones à Trafic limité sur les émissions de polluants est loin d'être proportionnel à la complexité du dispositif et au potentiel des restrictions qui peuvent être imposées aux automobilistes.

En l’état, les ZTL en France semblent revêtir un aspect essentiellement symbolique porté par une certaine couleur politique. Néanmoins, ces Zones n’en sont qu’à leurs balbutiements ; à l’image des ZTL italiennes, nous pouvons craindre des restrictions de circulation particulièrement lourdes sur la mobilité des citoyens et d’innombrables amendes à la clé, par le biais de l’alourdissement du champs d’application des zones.

Des craintes d’autant plus légitimes qu’avec la disparition annoncée des ZFE, les Mairies pourront être tentées de changer leur fusil d’épaule en adoptant les ZTL.

S'inscrire à la newsletter de 40 millions d'automobilistes

Écrit par 40MA Dernière modification le mercredi 16 juillet 2025